Joseph Schwartz

Paris

« Je n’ai pas le sentiment d’avoir ressenti de la peur, mais plutôt une très forte angoisse, qui durait tout le temps.»

 

Nous avons rencontré Joseph en novembre 2021, quelques mois après son intervention très remarquée lors de la cérémonie nationale de commémoration de la rafle du Vel d’Hiv. Joseph est comme on l’imaginait : nature-peinture, qu’il aime tant et qui orne si bien les murs de son appartement.

 

Joseph Schwartz naît le 18 février 1927, à l’hôpital Rothschild, dans le 12ème arrondissement de Paris.  Il vit dans le 11ème, puis le 13ème arrondissement, avec ses parents et son petit frère, Paul.

En 1940, Joseph a 13 ans et fait sa Bar Mitzvah. “Mais bon, l’ambiance n’est pas terrible…” souffle Joseph. À la maison, il célèbre les grandes fêtes juives avec ses parents. “On faisait Souccot chez nous, car on avait une cour”.

 

Le 15 juillet 1942, la famille de Joseph est avertie qu’une grande rafle se prépare. Par précaution, il se réfugie chez des amis non juifs de ses parents, à Choisy-le-Roi. Son père se cache quant à lui dans un parking exigu, mais sa mère et son frère restent à leur domicile parisien. “Mes parents étaient convaincus que les femmes et les jeunes enfants ne seraient pas concernés par cette rafle” explique Joseph. 

Hélas, très tôt le matin du 16 juillet 1942, la mère et le frère de Joseph sont arrêtés. Son père prévient alors ses amis de Choisy-le-Roi qu’il va se rendre à la police afin d’être avec sa femme et son fils. Apprenant cela, Joseph prend l’autobus et, en arrivant dans la rue du domicile familial, trouve les voisins hébétés, choqués. 

 

Joseph ne trouve personne de sa famille. Il se rend alors chez les Finkels, une famille voisine, dont le fils était ami avec Paul.  Alors qu’il se trouve chez les Finkels, la police frappe lourdement à la porte. “Nous n’avons pas ouvert, alors ils ont enfoncé la porte.” précise Joseph.

“Nous avons été conduits au commissariat du 13ème arrondissement.” raconte Joseph. Épuisé, il s’y assoupit et est réveillé par un policier qui l’emmène avenue des Gobelins, dans le bâtiment du Secours national du Maréchal Pétain, qui servait de lieu de rassemblement pour les juifs raflés du quartier. 

La situation de Joseph est vérifiée par la police : il est considéré comme apatride. Bien qu’il soit né en France, ses parents ayant été naturalisés français, puis dénaturalisés par les lois de Vichy, il en était de même pour Joseph et son frère.

Au petit matin, Joseph s’approche des grilles du bâtiment. “Un garde m’a crié dessus ‘Fiche le camp !’. Sur le moment, je n’ai pas compris… Mais, dans un sursaut presque animal, j’ai pris mes jambes à mon cou et j’ai remonté l’avenue Auguste Blanqui en courant et j’ai arraché mon étoile jaune.” raconte Joseph. 

Il se rend dans le 20ème arrondissement de Paris, chez sa grand-mère. Celle-ci est arrêtée quelques mois plus tard, en février 1943. “Je n’ai pas le sentiment d’avoir ressenti de la peur, mais plutôt une très forte angoisse, qui durait tout le temps.” confie Joseph.

 

Aujourd’hui, Joseph est fier d’avoir été, aux côtés de Beate et Serge Klarsfeld, de toutes les luttes et de tous les procès, depuis maintenant 40 ans. 

Ses héros dans la vraie vie ? Tous ceux qui ont lutté pour la liberté.

Pour lui, le bonheur est simple. Il se résume à “un bon bouquin” et de la musique, “le Requiem de Mozart par exemple”.  Amateur d’art et de culture, Joseph aime particulièrement les œuvres de Milan Kundera, et les tableaux du Caravage. 

Quelque part entre le clair et l’obscur, on se dit que Joseph a fini par trouver sa place.