Pierre Osowiechi

Ile-de-France

« Ce jour-là, j’ai retrouvé la dame qui m’avait donné du lait ! »

 

Nous rencontrons Pierre le 3 décembre 2021, chez lui, en région parisienne. Heureux hasard, ce jour-là, Pierre fête ses 84 ans ! Il est entouré de sa fille, Muriel, et de l’une de ses petites-filles.

 

 

Pierre Osowiechi est donc né le 3 décembre 1937, à l’hôpital Rothschild, dans le 12ème arrondissement de Paris.

Il vit à Montreuil avec ses parents et ses grands-parents maternels. Son père, d’origine polonaise, est arrivé en France en 1928. Il tient une boutique à Bagnolet et a reçu un document de résidence autorisée. Ses parents se marient en 1936.

À la maison, Pierre célèbre quelques grandes fêtes du calendrier juif mais le rapport au judaïsme est quasiment inexistant. “On parlait en français. Seul mon père parlait parfois yiddish” précise-t-il.

 

 

En 1940, Pierre part dans la Creuse avec sa mère et ses grands-parents. Son père reste à Paris car il est engagé volontaire étranger.

“On devait aller beaucoup plus loin mais la voiture est tombée en panne sur la route ! On s’est donc arrêtés à Crocq.” explique Pierre. “Là, au milieu de la route, une femme m’a aperçu et m’a donné du lait.” précise-t-il.

 

 

À Crocq, une vie presque normale suit son cours. Pierre va à l’école, et a pour maîtresse Madame Delair.

Tout le village est parfaitement au courant de la situation particulière de la famille Osowiecki, et de celle d’autres familles, cachées également.

Pierre mentionne Marie-Thérèse Goumy, puis Marie Lagrollière grâce auxquelles plusieurs familles ont notamment pu avoir de faux papiers.

“Un jour, Madame Lagrollière est venu me chercher à l’école et m’a fait traverser la cour en courant, devant des camions allemands. Elle m’a emmené dans un grenier pour me cacher, avec ma mère et mes grands-parents. Nous nous sommes mis sous les couvertures.” raconte Pierre.

À cette époque, Pierre l’ignore, mais Marie-Thérèse Goumy et Marie Lagrollière lui sauvent la vie.

 

 

Des années plus tard, en 1995, l’association “Souvenirs et mémoires 1940-1945” a organisé une cérémonie en l’honneur des habitants de Crocq. “Ce jour-là, j’ai retrouvé la dame qui m’avait donné du lait !” confie Pierre, ému.

C’est suite à cette cérémonie que Pierre a voulu s’engager au sein du Comité français pour Yad Vashem.

Le 2 avril 2006, il organise une cérémonie pour attribuer le titre de Juste parmi les Nations à Marie-Thérèse Goumy et à Marie Lagrollière.

 

 

Pierre devient ensuite bénévole au Comité français pour Yad Vashem et aide d’autres juifs à faire reconnaître “Justes” ceux qui les ont sauvés.

“J’ai gravi les échelons, et je suis devenu l’un des vice-présidents du Comité français pour Yad Vashem” nous dit-il, sous les regards admiratifs de sa fille et petite-fille.

 

 

Aujourd’hui, quand on lui demande de quoi il est fier, Pierre répond - sans hésiter : “d’être juif !”

Pierre ajoute qu’il a beaucoup d’admiration pour Simone Veil. “Je l’ai rencontrée lors d’une cérémonie de Yad Vashem de remise de médailles à Paul Schaffer.”

 

 

Ses enfants, Nadine, Francis et Muriel, et ses six petits-enfants le rendent heureux et l’entourent beaucoup.

Plus tard dans la soirée, Muriel nous envoie une photo de son père soufflant ses bougies sur les beignets que nous avions apportés. Pierre, c’est certain, ne manque ni de cœur, ni de souffle.